Writings
Marc Krüger,
ou les éblouissements du dehors
Chez Marc Krüger, qui sidère le regard, le voir et le jamais-vu s’étreignent. Choc pudique et retenu des effets d’art, et de l’œuvre véritable. Maître subtil des vives tensions du noir et du blanc, il traverse à vif les données visibles du monde ordinaire, et l’ordinaire, d’ordinaire aveuglant, transformé au-dedans dans sa trame la plus intime, se prend à éblouir. L’habituelle pesanteur s’allège du poids lourd des habitudes visuelles, et le spectacle attendu du quotidien devient troublante féérie. L’énigme de l’existence, tout entière au cœur de l’œuvre, étend ses étranges pouvoirs, et le monde des hommes, entre miracle de l’éphémère et magie de l’instant, s’enrichit d’une innocence absolue.
Une infinie fragilité s’abandonne aux mystères retrouvés du dehors. Marc Krüger dessille l’étendue, et l’émerveille. Les tremblements de l’être-au-monde, fabuleux de présence sensible et de subtilité quasi chromatique, préservent de l’achèvement des formes, des idées et des êtres. Et l’émotion des profondeurs, si obscène à la surface des écrans, peut croître…
Marc Krüger,
or the dazzling glare from the outside
In Marc Krüger's work - which has us rubbing our eyes in amazement - the act of seeing and things unseen intertwine. A modest, restrained shock from the effects of art itself and the genuine work of art. As a subtle master of the lively tensions of black and white, he passes nakedly through the visible data from the ordinary world, and the ordinary, which is ordinarily blinding, transformed inside his most intimate fabric, begins to dazzle. The usual heaviness sheds the heavy load of visual habits, and the expected everyday spectacle becomes a disturbing magical display. The enigma of existence, which lies in its entirety at the heart of the work, stretches out its strange powers, and the world of men, which lies somewhere between a fleeting miracle and momentary magic, gains an absolute innocence.
An infinite fragility gives itself up to the mysteries recovered from the outside. Marc Krüger opens the eyes of the expanse and fills it with wonder. The tremors of being in the world, fabulous in its sensitive presence and near-chromatic subtlety, preserve shapes, ideas and beings from completion. And the emotion of the depths, so obscene on the surface of screens, can grow…
Christian Noorbergen, critique d’art, curateur
A propos de Marc Krüger
Sitôt que l'on met un pied devant l'autre dans ce mouvement frénétique pour la vie, c'est vers la mort que l'on marche, vers la disparition, l'absence, l'oubli. Inéluctable paradoxe de l'existence, l'agitation des corps est éphémère, fugace, peut-être vaine.
Marc Krüger, photo- graphe nous montre l'impossible arrêt sur l'image des autres, l'incessante chorégraphie de l'humain dans son décor urbain, prison. Et pourtant l'intention... retenir un instant les fantomatiques silhouettes de ces êtres que le temps dématérialise, comme il déconstruit les architectures prétentieuses de nos volontés de pouvoir.
Dans ses compositions "futuristes" d'une saisissante picturalité, d'un graphisme si abouti qu'il provoque même le doute sur le media employé, Marc Krüger nous retient fascinés, quand il fige un instant l'incessant tourbillon des formes, des ombres et des lumières piégées dans un même vertige.
About Marc Krüger
As soon as we place one foot in front of the other in this frenetic dash for life, we are walking towards death, towards extinction, absence and oblivion. The ineluctable paradox of existence is that the thrashing of bodies is ephemeral, fleeting and perhaps in vain.
As a photo-grapher, Marc Krüger, shows us the impossible freeze frame of others, the incessant choreography of the human being in his urban setting, which is a prison. Even so the intention was... to hold back, if only for a moment, the ghostly silhouettes of these beings which time dematerialises, as it deconstructs the pretentious architectures of our will to power.
In his strikingly pictorial "futuristic" compositions, which employ a graphic style so accomplished that it can even cause you to doubt what medium was used, Marc Krüger holds us fascinated, when, for a moment, he fixes the incessant whirlwind of shapes, shadows and lights trapped in a single dizzy spell.
Piero Cavalleri